Saint-Gabriel-de-Rimouski le 2 mai 2000 Mme Louise Harel ministre Ministère des Affaires muunicipales Édifice Jean-Bapttiste De La Salle 20, rue Pierre-Olivier-Chauveau Aile Chauveau, 3" étage Qu6bec G1R 4J3 Objet: Problèmes d'une femme engagée en politique municipale Madame La ministre Je fais partie de ces femmes qui sont venues en politique municipale suite à la sollicitation du ministère des Affaires municipales et du Conseil du statut de la femme. J'ai suivi une session de sensibilisation donné par le ministère des Affaires municipales. Je me suis présentée à 1'élection municipale de novembre 1998, j'ai été élue, je suis la seule femme siègeant au conseil municipal. Saint-Gabriel-de-Rimouski est une municipalité rurale d'environ 1400 résidents. Voici ma situation, tant que j'ai partagé l'opinion de mes collègues masculins et du maire, je n'ai pas eu trop de difficultés à me faire accepter. Mais depuis que j'ai émis une opinion différente du groupe, tout a basculé, les autres membres du Conseil me traite littéralement comme une ennemie. Depuis la session du 7 février 2000, jour où je n'ai pas voté dans le même sens que mes collèques et que j'ai inscrit ma dissidence sur une resolution, je dois subir harcèlement et reproches continuels de la part des membres du Conseil et du maire durant les sessions de travail, sous le prétexte que je les ai fait "mal paraître" en ne votant pas du même bord qu'eux. Le principe démocratique de base qui consiste au simple respect de l'opinion n'est pas reconnu ici. On m'isole, des caucus se tiennent, entre hommes, en mon absence. On cherche tout simplement à me casser pour ne pas dire à me faire démissionner. Je n'aurai bientôt d'autres choix que de faire preuve de soumission ou bien de démissionner. Ces deux avenues me semblent, pour le moment, inacceptables. Mais combien de temps pourrais-je tenir dans ces conditions? Cette situation est très blessante et épuisante aussi. Je n'ai aucun support, ni accompagnement de la part du ministère des Affaires municipales, je suis abandonnée à mon sort. Je ne vois pas ce que ça change dans la politique municipale qu'une femme soit élue dans un tel contexte et sans aucun soutien. II n'y a pas d'évoltition possible dans ces séances de cafouillages où la formation de base fait dramatiquement défaut même de la part d'un maire qui est en politique municipale depuis quelques 20 ans. J'ai demandé, à plusieurs reprises, de la formation pour les membres du Conseil nouvellement élus, sans succès. Ce que je comprend, malheureusement, c'est qu'il n'est jamais bon pour une femme de se montrer le moindrement intelligente et de faire preuve de jugement dans un milieu majoritairement masculin, cela porte facilement ombrage à certains Messieurs et c'est le prétexte à bien des mesquineries et des jalouseries. Dans ce contexte, les qualités deviennent des défauts et les réussites sont traitées comme des échecs. Je ne vois pas comment je pourrais servir les intérêts de ma collectivité, dans une pareille situation. Je suis une femme courageuse et très engagée et j'ai mené bien des luttes dans ma vie, mais je- trouve qu'il y a des limites à l'abus et au manque de respect des opinions même si les propos sont tenus sous signe privé. Je vous écris avec l'espoir que vous ferez, peut-être, quelque chose avant qu'il soit trop tard. Plusieurs femmes engagées en politique municipale vivent des situations semblables à la mienne, garder le silence ne réglera pas le problème. En espérant que vous trouverez des avenues d'interventions pour ouvrir quelque peu les horizons d'un monde où les femmes essaient de prendre leur place de peine et de misère. Bien à vous Ariane Olivier Ouellet, conseillière c.c. Mme Diane Lavallée présidente du Conseil du statut de la femme